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« Un homme ne peut être à la fois un prédicateur, un bon pasteur, un leveur de fonds, un rédacteur de rapport et un missionnaire heureux »

Théodore Lafleur, pasteur, l’Église Baptiste de l’Oratoire au Québec, 1879

 

Le pasteur et ses priorités

Mon super-héros préféré est Superman. Sous plusieurs aspects, notre travail en tant que pasteur ressemble au quotidien de Superman : nous combattons une « bataille sans fin » (la liste de choses à faire ou que nous pourrions faire ne se terminera jamais), une urgence peut survenir à tout instant du jour et la nuit, même en vacances nous ne pouvons pas mettre notre vocation de côté et les gens pensent parfois que nous venons d’une autre planète ! Un membre de l’église me suggérait dernièrement de prier pour de la belle température pour le BBQ car Dieu m’écouterait probablement davantage…

Pourtant, loin d’être Superman, le pasteur est souvent épuisé mentalement et physiquement quand vient le temps de prendre ses vacances. À la différence du psychologue qui met une barrière entre sa vie professionnelle et personnelle (les patients ne l’appellent pas à la maison), le pasteur est sollicité de partout : c’est un message-texte, un courriel, un coup de téléphone, un statut Facebook… Le pasteur vit au jour-le-jour avec ses paroissiens. Il s’en fait pour eux, il pense à eux, il les rencontre au supermarché et à la quincaillerie. Ses enfants jouent avec les leurs. Il connaît leur belle-familles, leurs combats, leurs problèmes. Il se réjouit quand un couple va mieux et il s’attriste quand un couple se déchire ou se sépare.

Venu juin, il a souvent le goût de se retirer dans sa forteresse de solitude et d’y rester. Heureusement, les vacances et les rayons du soleil jaune lui permettent de se ressourcer et dès que ses batteries sont à peine rechargées, il commence à penser à l’automne, à la rentrée et à tout ce qu’il rêve de pouvoir mettre en branle. Où donner de la tête ? Comment décider quelles priorités méritent notre attention ? J’aimerais vous proposer quatre principes pour vous guider dans ce processus.

Principe # 1 : Celui qui échoue à planifier, planifie d’échouer.

Je vis ce principe semaine après semaine. Les semaines où j’ai pris le temps de placer mes priorités dans mon horaire sont généralement de bien meilleures semaines que celles où je n’ai pas planifié. Si je n’ai rien planifié, je serai rapidement aspiré par toutes les demandes des autres (les gens d’églises, ma famille ou moins glorieusement, tous ces courriels inutiles ou statuts Facebook dans lesquels nous perdons du temps précieux).

Principe #2 : L’horaire a été fait pour l’homme, pas l’homme pour l’horaire

Dans son excellent livre How to Thrive as A Small Church Pastor, Steve Bierly écrivait qu’une des frustrations des pasteurs était d’être dans leur bureau à planifier le futur de l’Église et son accroissement tout en devenant frustrés des interruptions : un tel qui est entré à l’hôpital, un autre qui a besoin (encore!) d’un conseil de couple ou d’une mère qui cherche des recommandations de lecture pour ses enfants. Bierly nous exhorte : “Messieurs, ces interruptions n’empêchent pas le ministère. Elles sont le ministère !

Principe # 3 : La vie pastorale n’est pas un boulot 9 à 5. Deal with it.  

La vie pastorale n’est pas un boulot 9 à 5. Il faut vivre avec pour les bons coups et les moins bons coups. « Pardon madame Tremblay, il est 5:02pm, veuillez rappeler demain et nous pourrons vous aider avec votre deuil ». Une des difficultés que plusieurs expérimentent est de remplir leur horaire 9 à 5 en plus de toutes les urgences et choses non-planifiées qui viendront se rajouter.  La gestion du temps de pasteur n’est pas une gestion de temps professionnel c’est une gestion de vie globale.

Je donne cet exercice de réflexion dans mon cours de ministère pastoral. L’activité suivante est-elle professionnelle ou personnelle ?

  •         Écouter le Superbowl avec les gars de l’église et leurs invités
  •         Recevoir pour souper à la maison des visiteurs de l’église
  •         Le temps de culte personnel
  •         Le temps de lecture
  •         La lecture des nouvelles et de l’actualité
  •         Les soirs où vous êtes en députation (levée de fonds) loin de la maison
  •         Siéger sur le conseil d’établissement de l’école de vos enfants
  •         Jouer au volley-ball dans une ligue du quartier de l’église avec quelques-uns de l’église.

Séparer ces activités entre professionnel ou personnel est pratiquement impossible. J’ai rarement passé un Superbowl à pouvoir l’écouter sans qu’un membre de l’église m’accroche pour me parler de problématiques dans sa vie. Un pasteur qui n’a pas une vie personnelle avec Dieu ne sera pas pasteur de grand-chose.  Je vois une grande différence dans mes prédications les semaines que je lis davantage – même si mes lectures n’ont pas toutes un lien direct avec mon message. J’irais peut-être jouer au volley-ball si j’étais seul, mais créer des contacts dans le quartier, être un modèle missionnel pour mes gens et investir dans leur vie fait définitivement partie de mon mandat pastoral.

Cette distinction est encore plus flagrante pour les ouvriers bi-vocationnels. Un homme sage a dit un jour : « Être pasteur à mi-temps ça n’existe pas. C’est plutôt être payé à moitié ». J’ai dû, comme plusieurs de mes confrères à plusieurs moments de mon ministère faire autre chose en plus du ministère. J’ai beau essayer de me restreindre et de ne faire qu’un « mi-temps » mais, c’est plus fort que moi. Être pasteur c’est quelque chose que l’on est et non pas quelque chose que l’on fait. Je ne peux pas imaginer l’apôtre Paul faire des tentes sans penser à l’Église et comment prendre soin des Églises que le Seigneur lui a confié. Il faut arrêter d’obséder avec « nos heures » et plutôt protéger nos priorités.

Principe #4 : Le pastorat : les objectifs sont plus importants que l’horaire

J’aimerais vous suggérer de ne pas tellement penser à votre tâche en termes d’horaires mais en termes d’objectifs. Qu’est-ce qui est vraiment important cette session ? Quels sont les objectifs que je voudrais atteindre (ou du moins aller dans cette direction) ?

Voici quelques axes importants à considérer dans la planification pastorale

  •         La prédication
  •         La formation de disciple
  •         La formation de leaders
  •         Le suivi pastoral
  •         La croissance spirituelle personnelle
  •         Prendre soin de sa famille
  •         Prendre soin de soi-même (loisirs, santé)

D’autres aspects peuvent aussi être présents selon votre situation

  •         Administration
  •         Levée de fonds
  •         Vie d’église
  •         Autre

J’aimerais vous suggérer de déterminer des objectifs pour chacune des catégories ci-dessus et de les discuter avec votre équipe et de faire la liste des choses requises pour les atteindre. Comme le dit la citation au début de ce billet, un seul homme ne peut tout faire en même temps. La réussite des objectifs sera le résultat du travail de l’équipe.

Je vous encourage fortement à insérer dans votre horaire global le temps pour l’épouse, la famille et l’exercice. Être un pasteur c’est aussi être un exemple et être en santé. C’est aussi de modeler un certain équilibre. Un pasteur workaholic sera rapidement et littéralement un serviteur inutile : il endommagera sa famille et par ricochet la crédibilité de son ministère.

Une fois les objectifs décidés, l’on peut, à chaque semaine, monter l’horaire en fonction de ces objectifs en premier et placer le reste ensuite. Je pourrais passer tout mon temps à aider des cas pastoraux plus lourds et rien d’autre n’avancerait dans l’Église. Si nous mettons toujours de côté la formation de leaders pour régler les urgences et éteindre les feux, nous nous brûlerons. Superman, à un moment donné dira : j’entends tout. Le plus difficile est de choisir qui vit et qui meurt. Même Superman ne peut tout faire. Certains objectifs auront besoin d’attendre à un autre moment ou d’être délégué. En l’absence d’une équipe, une priorité sera la formation pour arriver à avoir une équipe !

Il faut, bien sûr, laisser une marge dans notre horaire. Comme le disait un collègue, Nicolas Cotnoir, si nous chargeons notre horaire à 100% de capacité, quand les urgences arriveront – et elles arriveront – et que nous roulerons à 120%, quelque chose sautera à un moment donné : la famille, le ministère, la santé ou toutes celles-ci.   

Jean-Sébastien Morin est pasteur de l’Église Baptiste Oasis et professeur de recherche et rédaction en Nouveau Testament à SEMBEQ (Séminaire Baptiste Évangélique du Québec). Il est l’auteur de trois livres dont le livre Mariés et heureux ? gagnant du Prix des Mots 2016. Il est aussi le fondateur du ministère Couple de Rêve qui vise à aider les couples avec la puissance transformatrice de l’Évangile.  

 

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